Eletre S, un SUV nommé Lotus ?
Tous l’ont fait : les grandes marques sportives ont toutes fini par sortir un SUV sur-vitaminé arborant le prestigieux badge de leur fratrie ultraplate. À son tour, Lotus nous sert un « hyper-SUV » purement… électrique.
Tous l’ont fait : les grandes marques sportives ont toutes fini par sortir un SUV sur-vitaminé arborant le prestigieux badge de leur fratrie ultraplate. À son tour, Lotus nous sert un « hyper-SUV » purement… électrique.
Tendance due au fait qu’une grande partie de leur clientèle se compose désormais de « boomers » qui ont de plus en plus de mal à s’extraire de bolides qui font à peine un mètre de haut ou simplement un moyen de surfer sur la vague des SUV ? Les chiffres de vente leur donnent raison en tout cas puisque Lotus renoue avec le succès commercial depuis son rachat (ou sauvetage) par le Chinois Geely.
Reste-t-il de l’ADN Lotus dans l’Eletre ?
L’engin, faisant plus de 5 m de long et pesant pratiquement l’équivalent de trois Lotus Elise, on imagine Sir Colin Chapman se retourner dans sa tombe. Lui, pour qui la légèreté était le maître mot dans la conception d’une voiture. Mais la technologie des véhicules électriques actuelle ne favorise pas vraiment les poids plumes, surtout quand il s’agit de nourrir aux électrons 600 chevaux en garantissant une autonomie compatible avec une grande routière. Mais ne jugeons pas avant de goûter !
En découvrant l’Eletre (qui est censé se prononcer EletrA) en vrai, on est face à un véhicule certes imposant, mais aux lignes clairement taillées au style Lotus. Les phares échancrés, les grandes roues, la proportion de la ceinture de la carrosserie remontant à l’arrière combinée à un vitrage étroit lui confèrent une élégance féline qui rappelle clairement les super-sportives de la marque. En poussant plus loin la métaphore, le caractère se vérifie à l’usage : silencieuse et sur des pattes de velours, mais toujours prête à bondir… On y reviendra plus loin !
Bienvenue en première classe
En s’approchant de l’Eletre, les poignées sortent grâce à la petite clé en forme du logo Lotus, certes stylée, mais tellement facile à perdre qu’ils feraient bien d’y intégrer un AirTag ! L’intérieur paraît, comme par magie, plus grand qu’on pourrait le croire de l’extérieur. Le design très épuré du tableau de bord en fine bande devant le conducteur et le grand écran semblant flotter au milieu n’y sont pas pour rien. L’affichage tête haute supplémente l’information. Le toit translucide et les couleurs gris clair de l’habillage de notre véhicule amènent une luminosité étonnante, malgré le temps maussade. Revêtement à doubles coutures apparentes, volant et surfaces en alcantara, c’est beau ! Lotus affirme d’ailleurs qu’une grande proportion des matériaux utilisés sont recyclés et végans. Le ressenti de qualité, en tout cas, n’en souffre aucunement.
Les sièges, dotés de toute la panoplie de fonctions imaginables, sont enveloppants et d’ailleurs se resserrent quand on active le mode sport. À l’arrière, grâce à l’empattement important et à l’absence de tunnel central, l’impression de voyage en première classe se confirme.
Hyper-SUV ?
Le marketing adore jouer des superlatifs et même hyperlatifs dans le cas de Lotus. On était donc curieux de voir ce qui pouvait justifier un tel qualificatif au volant de l’Eletre. La prise en main est facile, une fois habitué aux rétroviseurs électroniques (ce qui demande quand même un certain temps d’adaptation), on commence à se faufiler dans le trafic en mode « Tour ». La suspension pneumatique gomme efficacement même les pires nids de poule et, en conjonction avec les quatre roues directionnelles dont était équipée notre Lotus, l’agilité est surprenante. Comme on peut s’y attendre, le couple des moteurs électriques procure des reprises fulgurantes, même si on a l’impression que le démarrage depuis l’arrêt est quelque peu bridé. Est-ce pour ménager la mécanique ou pour creuser l’écart avec la version R à 900 ch ? En tout cas, on n’a pas l’effet « coup du lapin » comme sur d’autres électriques aux puissances comparables. Cela dit, cela reste très impressionnant et les dépassements se font en un clin d’œil.
Sur route sinueuse, l’agilité et la bonne tenue de route se confirment, c’est sécurisant sans être incisif. Passant en mode « Sport », les suspensions et la direction se raffermissent modérément sans vraiment apporter un grand plus au niveau de la sportivité. Le retour de sensations au volant est certes bien meilleur que sur une Tesla Model X, par exemple. Cependant, malgré un pilotage actif du roulis et le centre de gravité bas, on ne se sent jamais au volant d’une « vraie » voiture de sport, le poids et la position de conduite en hauteur jouant bien sûr sur les sensations.
C’est clair qu’on ne peut pas s’attendre aux sensations d’une Evija dans un SUV de ce calibre et ce n’est probablement pas le but recherché. Le terme « hyper » serait-il plus approprié pour l’Eletre en version R ?
Des mises à jour « over-the-air »
Bardée de capteurs comme un chasseur F-35 (4 lidars, 6 radars, 7 caméras haute définition, 12 capteurs ultrasons), on s’attendrait à ce que les aides à la conduite soient d’un niveau exceptionnel. Lotus annonce d’ailleurs que l’Eletre est prête pour la conduite autonome de niveau 3, voire 4, en fonction de la réglementation à venir. Ces fonctionnalités seront mises à jour « over-the-air ». Il reste du pain sur la planche, car, malgré un affichage assez impressionnant du trafic environnant sur l’écran central, le cruise control adaptatif a tendance à ralentir inopinément, notamment pendant les changements de voie sur autoroute, et s’obstine à rappeler de garder les mains sur le volant alors qu’on le tient fermement. L’importateur est conscient du problème (essai en mars 2024) et des mises à jour seront appliquées prochainement.
Délicieusement irraisonnable
Étant donné le gabarit, les performances et sa destinée de grande routière, il fallait assurer une autonomie raisonnable en mettant une grosse batterie de 112 kWh. Lotus affiche une autonomie de 600 km WLTP. Comme d’habitude, l’autonomie réelle est nettement en deçà : pendant notre essai sur un trajet autoroutier de 200 km à une vitesse moyenne de 102 km/h, la consommation affichait 27,8 kWh/100 km, ce qui donne une autonomie autour de 400 km. Avouons qu’on a de temps en temps joué avec l’accélérateur et qu’il est possible de faire beaucoup mieux. On se retrouve dans des consommations comparables à d’autres SUV plus sages de la même taille. Un autre point important pour voyager concerne la capacité à recharger rapidement. Avec 350 kW de puissance de recharge affichée et une technologie de 800 volts, on pourrait s’attendre à recharger le temps d’un café. En testant, on aura pourtant rarement dépassé les 160 kW. D’après les informations fournies, Lotus travaillerait sur une mise à jour du pré-conditionnement qui augmenterait les performances de charge.
Dans le rayon convivialité, on notera le grand coffre de 688 L et l’impressionnant système sonore KEF avec jusqu’à 23 haut-parleurs et 2160 W, dépendant des options.
Se différenciant de la masse, le design, le gabarit, les performances et le prix de 160 770 € (version essayée) font de l’Eletre un objet désirable plutôt qu’un vulgaire moyen de déplacement. Mais elle s’affranchit également très bien de ce rôle-là…
Les + :
- Design enthousiasmant
- Performance
- Confort et efficacité des suspensions
- Qualité des finitions
Les – :
- Aides à la conduite perfectibles
- Bruit du moteur d’aileron
- Chauffage inconsistant
Fiche technique ELETRE S (version essayée):
Propulsion : 2 moteurs à aimants permanents, 4 roues motrices et directrionelles (option)
Puissance : 450 kW / 710 Nm
Emissions : 0g CO2/km
Autonomie : 600 km WLTP
Accélération : 0-100 km/h en 4,5 s
Charge : 22kW AC / 350kW DC
Prix : à partir de 120 090 €
Par Claude Poull